« Le smart grid, né de la convergence de l’énergie et du numérique, est une vraie opportunité »
Décideurs. La problématique principale en Europe reste l’intégration des énergies renouvelables dans le mix. En quoi le smart grid s’impose-t-il comme une solution incontournable face à la nouvelle donne énergétique ?

Claude Mazallon.
Le système de contraintes économiques et environnementales dans lequel se trouve l’Europe - et la France - nous conduit à une transition énergétique majeure où les énergies renouvelables ont et auront une place importante. Ces nouvelles sources d’énergie (éolienne et photovoltaïque) ont cependant la caractéristique d’être à la fois intermittentes et réparties de manière irrégulière. Elles ne produisent pas forcément au moment où on en a besoin et ne sont pas forcément situées à l’endroit où apparaît la demande, ce qui perturbe la stabilité du réseau électrique et celle de la tension délivrée. S’ajoute à cela une demande en augmentation constante, avec des pointes de consommation de plus en plus élevées (+ 40 % sur les douze dernières années, soit trente gigawatts), qui génère des besoins de production supplémentaires ponctuels chers et difficiles à utiliser.
Le réseau électrique doit donc s’adapter très rapidement à toutes ces variations ; c’est là tout l’enjeu du smart grid, qui est de le doter de suffisamment d’intelligence pour pouvoir équilibrer l’équation entre diversité des consommations et diversité des productions. Cela nécessite une modernisation et une numérisation du réseau actuel, qui n’a pas été conçu à l’origine pour supporter de telles évolutions.

Décideurs. Comment développer davantage de sécurité pour les réseaux et les usagers ?

C. M.
Il faut faire la distinction entre la sécurité - qui concerne les biens et les personnes -, et la sûreté de fonctionnement du réseau lui-même. La première est garantie par un système de normalisation imposé aux installations électriques et aux produits qui les constituent. La seconde est assurée par la fiabilité intrinsèque des produits et des installations, mais aussi par l’intelligence des systèmes.
Développer plus de sûreté, c’est rendre le réseau plus résistant aux incidents aléatoires et aux contraintes liées aux fluctuations de la demande et de la production. Schneider Electric, par exemple, dispose de solutions de détection automatique de défauts sur les lignes qui permettent de réorganiser le maillage du réseau pour isoler la partie en défaut. Il est aussi possible d’anticiper les pointes de consommation grâce à des modélisations, et de piloter des effacements de charge (avec l’accord des consommateurs), sans sacrifier ni le confort, ni la disponibilité des installations. Les évolutions technologiques rendent possibles aujourd’hui ce qui ne l’était pas auparavant.

Décideurs. Et a-t-on à ce jour une idée exacte du coût des systèmes et l’impact du smart grid sur les coûts d’exploitation ?

C. M.
L’intégration d’éléments supplémentaires dans les infrastructures existantes aura de toute évidence un coût. Mais la bonne question est : « Quelle est la rentabilité de ces investissements au global pour la collectivité ? Et donc, quels sont les gains que le smart grid va générer ? » Les fonctions avancées des systèmes permettent en effet d’optimiser l’utilisation des capacités de production en place et de réduire les consommations d’énergie, d’où d’importantes économies au niveau des d’investissements. Ces systèmes apportent également une plus grande masse d’informations utiles, pour mieux connaître par exemple l’état des installations en temps réel, et donc anticiper leurs évolutions, réduire et mieux planifier les opérations de maintenance et au final, prolonger leur durée de vie.

Décideurs. Le smart grid constitue-t-il une nouvelle filière énergétique à part entière ?

C. M.
Nous avons en France une filière électrique forte, avec de grands groupes industriels, mais aussi des PME très dynamiques. Cette filière détient un savoir-faire qui nous est envié dans le monde entier et une maîtrise des technologies et des métiers, de la production au transport, en passant par la distribution et jusqu’aux différents produits et systèmes installés chez les usagers.
Comme Schneider Electric, tous ces acteurs sont très engagés dans le smart grid dans l’innovation et la R&D, et participent activement à de nombreux projets et démonstrateurs, sur le territoire national et dans le monde. Le smart grid, né de la convergence de l’énergie et du numérique, est une vraie opportunité et nous disposons de tous les atouts pour la transformer en création de valeur et d’emplois en France.

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