« La France est l’une des zones les plus actives du monde pour les financements de projets »
Décideurs. Comment expliquer l’attrait des investisseurs pour les actifs infrastructures ?

Michel-André. Volle. Il existe à l’heure actuelle un ensemble de conditions favorables à l’intervention des investisseurs institutionnels dans le financement de projets d’infrastructures. Ces opérations présentent en effet un taux de risque faible, appréciable pour des investisseurs soucieux de se diversifier dans des classes d’actifs moins volatiles. D’un point de vue plus conjoncturel, elles offrent par ailleurs des rendements intéressants, notamment comparés aux obligations d’État, dont les rendements sont particulièrement bas. Elles peuvent aussi constituer une bonne couverture contre les risques inflationnistes. Cumulés, tous ces facteurs font que les infrastructures représentent aujourd’hui une catégorie d’actifs particulièrement attrayante aux yeux des investisseurs.

Décideurs. Le marché est-il pour autant toujours aussi dynamique qu’il y a quelques années ?

M.A. V. Le marché français a retrouvé des couleurs après un creux en 2008. L’année 2012 a ainsi été marquée par plusieurs belles opérations. Nous sommes par exemple intervenus auprès du consortium constitué par Snam, GIC et EDF, à l’occasion du financement de l’acquisition de TIGF, cédé par Total. Nous avons également pris part au financement de la ligne à grande vitesse Nîmes Montpellier, dont la construction sera assurée par un consortium mené par Bouygues, groupe que nous accompagnerons aussi dans la construction du futur palais de justice de Paris. Cela dit, il est vrai que le pipeline a légèrement ralenti ces derniers mois, notamment du fait des contraintes budgétaires auxquelles le gouvernement est actuellement confronté. Mais il s’agit d’un creux relatif après les années fastes, et la France demeure l’une des zones européennes les plus actives en matière de financement de projets. 2013 devrait continuer sur cette lancée. À plus long terme, plusieurs secteurs nécessiteront ainsi des investissements de taille, à l’image de l’éducation, des nouvelles technologies de l’information et de la communication ou de l’environnement.

Décideurs. Dans quelle mesure les banques vont-elles être affectées par les nouvelles contraintes réglementaires ?

M.A. V. Les modes de financement sont à l’orée de changements structurels. Les ratios de liquidité imposés par Bâle III incitent les banques à limiter leur offre de financements à long terme, pour éviter le risque de refinancement. Les déboires de Dexia l’année dernière ont mis en évidence le risque pour les établissements bancaires d’avoir des structures de bilan déséquilibrées. Le marché a cela dit tenu grâce à plusieurs relais, comme la présence de banques allemandes ou japonaises très liquides adoptant un comportement contra cyclique, ou celle la BEI, ultra sollicitée ces derniers temps. Ces acteurs ont permis de continuer d’apporter des tranches à long-terme, rôle que de nombreuses banques assument aujourd’hui de moins en moins. Mais ces modèles ne sont pas viables à long terme, ce qui explique la recherche de nouveaux relais pour la dette longue et l’appétit croissant des investisseurs institutionnels. La plupart des grands assureurs, comme Allianz, Axa, Scor etc. se sont d’ailleurs récemment dotés d’équipes dédiées à cette pratique. C’est un signe qui ne trompe pas.

Décideurs. Quelles grandes tendances voyez-vous poindre sur le marché en 2013 ?

M.A. V. 2013 marquera un réel tournant pour les modes de financement des infrastructures, en Europe comme en France. Les schémas intégrant une composante obligataire devraient devenir de plus en plus fréquents. C’est déjà le cas en Amérique du Nord, alors que l’Europe est à l’inverse traditionnellement beaucoup plus bancarisée. Mais plusieurs projets ont récemment été financés de cette manière en Europe, comme des logements universitaires en Grande-Bretagne ou une autoroute en Hollande. HSBC a bien pris la mesure de ce changement de paradigme à long-terme, et a arrangé le financement de la Cité Musicale sur l’Ile Seguin, qui repose sur émission obligataire souscrite par Allianz. Il s’agit pour nous de la tendance la plus marquante de l’année 2013.

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