« La méthode française, celle du dialogue contractuel, inspire aujourd’hui de nombreux pays »
Décideurs. Quels sont les conditions de succès et les écueils à éviter lors de la contractualisation d’un partenariat public-privé ?

Fadi Selwan. Il est indispensable d’envisager le contrat comme le résultat d’un partenariat. Le PPP ne doit pas être choisi parce qu’il est un système de report de financement mais parce qu’il présente un intérêt socio-économique incontestable. Pour tirer le meilleur d’un PPP, au plus proche du besoin réel qu’il recouvre, les parties doivent partager toutes les informations relatives à leurs moyens et leurs contraintes en phase d’appel d’offre. Cet échange, réalisé dans le cadre d’un dialogue compétitif, fait évoluer le projet dans ses aspects fonctionnels, techniques et financiers. Ce dialogue permet au partenaire public d’identifier précisément ses besoins et au partenaire privé de fédérer ses moyens pour y répondre. Cette étape est un préalable nécessaire à l’élaboration d’une matrice des risques réaliste. Si concédant et concessionnaires travaillent ensemble au stade de la réflexion, la répartition des risques sera équilibrée.


Décideurs. Dans un rapport de 2011, la chambre régionale des comptes décrit le PPP comme une formule juridique souvent contraignante et financièrement aléatoire, qu’en pensez-vous ?

F. S.
En pratique, cette formule ne peut pas être financièrement aléatoire. Le partenaire privé s’engage à répondre au programme fonctionnel en contrepartie d’une redevance. Une annexe contractuelle détermine dès la conclusion tous les flux financiers. Le partenaire public contrôle chaque année le respect des critères de performance déterminés en amont. Si ces derniers ne sont pas respectés, le partenaire privé devra verser de lourdes pénalités financières. Le concédant contrôle le projet tout au long de son exploitation. Quant à la contrainte juridique, elle existe au début du partenariat. Mais lorsque la communication s’établit entre l’autorité publique et le concessionnaire, la transparence assure une sécurité juridique. L’offre finale est adaptée au besoin lors de la phase pressentie, le contrat signé est clair et les risques sont justement répartis.


Décideurs. Comment expliquez-vous le ralentissement du nombre de PPP ?

F. S.
Aujourd’hui, le nombre de grands projets décroît tout simplement car il n’y a plus de projet d’envergure dans le circuit à court terme. Les principaux chantiers ont été lancés en 2012. Concernant les petits projets locaux, leur ralentissement est lié aux arbitrages opérés par les collectivités locales eu égard à la situation économique difficile. Ce constat est le même qu’il s’agisse du recours aux concessions, aux PPP ou à la commande publique classique. Je ne pense pas que cette diminution tienne aux caractéristiques inhérentes aux PPP. La formule n’est pas en porte-à-faux. Lorsqu’un projet est nécessaire, utile et urgent, il est lancé quelles que soient les contraintes. Ce sont les autorités publiques qui définissent la forme juridique la plus appropriée. Sur la scène européenne, les projets en PPP allemands, belges, roumains ou encore slovaques sont en croissance. Certains pays choisissent de développer leurs infrastructures malgré la crise car c’est l’un des vecteurs d’une politique de relance.


Décideurs. Quelles sont les bonnes pratiques européennes et mondiales dont les entreprises françaises pourraient s’inspirer pour sortir de la crise aux côtés des pouvoirs publics ?

F. S.
Il n’existe pas d’ingrédient miracle. Le critère déterminant et dimensionnant reste l’adaptation du projet au besoin réel et sa pertinence socio-économique. La France a su, à l’image du PFI anglais, développer ses modèles de partenariat depuis 2004. Nous ne sommes pas en retard et n’avons pas besoin de l’expérience étrangère. En revanche, la méthode française, celle du dialogue contractuel, inspire aujourd’hui de nombreux pays, notamment les États-Unis.

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