Au Festival de Cannes, les avocats ne montent pas les marches, mais on les rencontre souvent à l’écran. Cette année, c’est Daniel Auteuil qui réalise et joue dans un long-métrage sur un avocat proche de la retraite, commis d’office dans une affaire d’homicide conjugal.
Cannes 2024. Le Fil, le film de Daniel Auteuil sur la dernière affaire d’un avocat pénaliste
Tapis rouge pour maître Jean Monier incarné par Daniel Auteuil dans Le Fil, premier long-métrage de l’acteur français sélectionné et présenté en Séance Spéciales au festival de Cannes qui vient de se cloturer. Adapté de la nouvelle Au guet-apens : chroniques de la justice pénale ordinaire de l’avocat pénaliste Jean-Yves Moyart, le cinquième film réalisé par Daniel Auteuil aborde le délicat sujet de l’homicide conjugal. C’est sa fille, Nelly Auteuil, une ancienne avocate en propriété intellectuelle reconvertie dans le 7e art, qui le produit aux côtés de Hugo Gelin.
Film sur la justice
Daniel Auteuil interprète un avocat désabusé qui a cessé de prendre des dossiers criminels depuis qu’il a fait innocenter un meurtrier récidiviste. Commis d’office sur l’affaire de Nicolas Milik joué par Grégory Gadebois, pensionnaire de la Comédie-Française de 2006 à 2012, il s’investit corps et âme dans la défense de ce père de famille accusé du meurtre de sa femme et dont il est convaincu de l’innocence. Quitte à se mettre en danger. L’acteur qui a autrefois incarné le tueur Jean-Claude Roman dans L’adversaire, explique au micro de France 3 : "C'est un avocat qui va déraper par rapport aux règles de son métier." Ce thriller psychologique raconte "l’histoire d’une rencontre entre un avocat et son client […] Vont naître pendant les trois années de l’instruction et une amitié et une complicité", détaille le comédien à Cannes. Il présente Le Fil comme un film sur la justice.
La bataille judiciaire s’est jouée au palais de Justice de Draguignan, dans le sud de la France. Le réalisateur du film y a dirigé les faux juges, les faux jurés et les fausses parties l’hiver dernier. Toujours pour France 3, il témoigne avoir ressenti "l'humanité qui régnait dans [le] prétoire" Et de s’étonner : "Cette façon dont les avocats et les accusés interagissent, plus personne ne les croit, c'est une drôle de chose que de défendre quelqu'un comme ça."
Jacques Vergès et Georges Kiejman
Autre avocat à l’affiche en 2023 : Roy Cohn, le mentor de Donald Trump, dans The Apprentice. L’ancien président des États-Unis a déjà annoncé intenter une action en justice contre le film, dénonçant une "ingérence électorale de la part des élites hollywoodiennes". Quelques années plus tôt, en mai 2018, c’est un véritable avocat qui avait gravi les marches de Cannes. Le Franco-Allemand Martin Hauser avait tenu le rôle d’un PDG confronté au syndicaliste joué par Vincent Lindon dans En guerre de Stéphane Brizé. L’an dernier, la profession avait également la cote avec les deux films judiciaires Le Procès Goldman présenté à la Quinzaine des cinéastes, dans lequel Arthur Harari interprète le regretté Georges Kiejman, et Anatomie d’une chute, qu’il co-signe avec son épouse Justine Triet (Palme d’Or 2023). Un autre grand pénaliste a été à l’honneur au festival cannois : Jacques Vergès, dans le documentaire L'Avocat de la terreur, réalisé par Barbet Schroeder et sélectionné pour Un certain regard au Festival de Cannes en 2007.
Considéré comme meilleur film de Daniel Auteuil selon Télérama, le long-métrage sort en salle en septembre 2024 et devrait faire vibrer les pénalistes en perte d’inspiration.
Anne-Laure Blouin