Depuis 2016, la justice française enquête sur les agissements de la société Lafarge en Syrie mise en examen pour complicité de crime contre l’humanité, mise en danger de la vie d’autrui et financement du terrorisme. Ce dernier point est au centre d’un accord à 780 millions de dollars conclu le 18 octobre entre le cimentier et la justice américaine. Il ne devrait pas avoir d’incidence sur la procédure française.

Selon le ministère de la Justice américain, les rapports entre le cimentier français et l’État islamique entre 2012 et 2014 sont perçus comme portant atteinte à la sécurité nationale américaine et justifient l’intervention des États-Unis dans l’affaire Lafarge. “Au milieu d’une guerre civile, Lafarge a fait le choix impensable de mettre de l’argent entre les mains de l’EI, l’une des organisations terroristes les plus barbares au monde, afin de continuer à vendre du ciment”, selon les propos, rapportés par le Monde, du procureur Breon Peace lors d’une audience de règlement à New York. 

La poursuite du géant mondial du ciment par les autorités américaines s’explique par l’agilité dont elles ont fait preuve pour trouver l’élément de rattachement de l’infraction au territoire américain, s’octroyant ainsi la compétence pour juger de l’affaire. C’est à l’issue d’une procédure du plaider-coupable que le ministère de la Justice américain a signé un accord avec Lafarge SA et sa filiale syrienne et leur a infligé une sanction financière d’un montant de 778 millions de dollars. C’est l'une des plus lourdes sanctions prononcées à l’encontre d’une société privée pour la fourniture d’un soutien à une organisation terroriste. 

Ni la transaction entre Lafarge et les autorités américaines ni la reconnaissance de culpabilité du cimentier ne devraient avoir d’incidence sur la procédure française en cours depuis 2017, cette dernière étant totalement distincte des procédures américaines. Pour rappel, l’affaire Lafarge a donné lieu à un feuilleton judiciaire ponctué d’allers-retours entre la chambre d’accusation de la cour d’appel de Paris et la Cour de cassation. La dernière décision prononcée au printemps dernier par la cour d’appel de Paris confirme la mise en examen de Lafarge pour complicité de crimes contre l’humanité. C’est la première fois qu’une personne morale est mise en examen pour ce motif.

Cette mise en examen vient s’ajouter à celles pour “financement d’une entreprise terroriste” pour les quelque 13 millions d’euros versés par Lafarge à l’État islamique pour maintenir son activité en Syrie, et pour “mise en danger de la vie d’autrui”, les salariés syriens ayant été maintenus sur site alors que le pays s’enfonçait dans la guerre. L’usine de la région d’Alep continuait en effet de fonctionner malgré la prise de contrôle de la région par Daech.

Le groupe Lafarge-Holcim étant présent dans de nombreux pays du globe, certains d’entre eux pourraient-ils être tentés de suivre l’exemple des États-Unis et d’actionner des poursuites contre le cimentier ? Rien n’est moins sûr. Pour poursuivre les agissements de Lafarge en Syrie, il leur faudrait pouvoir trouver un lien de rattachement à leur propre territoire.

Anne-Laure Blouin

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