Le Sénat demande un Digital Services Act plus robuste
Obsolète, la réglementation européenne applicable aux acteurs du numérique ? C’est l’avis des sénatrices Florence Blatrix Contat et Catherine Morin-Desailly. La bonne nouvelle, c’est que fin 2020, la Commission européenne a présenté aux États membres le Digital Services Act. Il prévoit, entre autres, d’encadrer l’utilisation des algorithmes qui président au modèle économique des plateformes en ligne. Mais les sénatrices voudraient que le texte aille plus loin. Que la France, qui a pris la tête de l’Union européenne le 1er janvier dernier, en profite pour proposer le renforcement du régime de responsabilité des hébergeurs.
“Occasion manquée”
Dans un rapport rédigé au nom de la Commission des affaires européennes et paru mi-décembre, les sénatrices demandent que les algorithmes, “aussi puissants qu’opaques”, soient publiés. Ce sont eux, insistent-elles, qui permettent l’exploitation de “très grandes quantités de données”, en particulier à caractère personnel. Leur publication, avant leur première utilisation et après chaque modification substantielle, permettrait aux tiers de rechercher des “risques potentiels pour les droits fondamentaux.”
Les autrices proposent également que les plateformes réduisent la visibilité des contenus signalés “si leur caractère illicite n’est pas manifeste” pour “protéger au maximum la liberté d’expression”, et que les moteurs de recherche soient inclus dans le DSA. Les plus grands pourraient aussi être soumis à des obligations similaires à celles des très grandes plateformes. En matière de ciblage publicitaire, là encore, les sénatricent appellent à aller plus loin que le projet de la Commission européenne. Ce dernier prévoit d’informer les utilisateurs des données utilisées et des paramètres de ciblage publicitaire, et la possibilité de désactiver ces paramètres. Le rapport demande "une désactivation par défaut de ces fonctions, et la possibilité à tout moment de les désactiver aisément."
Adoptée il y a vingt ans, la directive sur le commerce électronique, sur les principes de laquelle s’appuie le DSA, a été pensée pour les acteurs d’une économie naissante. En deux décennies, la donne a changé. Et les sénatrices d'alerter : “L’usage généralisé des services numériques est aussi devenu une source de risques.” Pour l’heure, le DSA leur “apparaît comme une occasion manquée de mettre les plateformes, et en particulier les grands réseaux sociaux, devant leurs responsabilités."