Stéphane Diagana, Laura Flessel, Kévin Mayer… Depuis plusieurs décennies, des sportifs français de haut niveau sont soutenus par La Française des jeux. À l’approche des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, Élisabeth Monegier du Sorbier, directrice juridique de la FDJ, revient pour Décideurs Juridiques sur les enjeux de ce partenariat unique.

Décideurs. Comment avez-vous vécu ce partenariat avec les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 ?

Élisabeth Monegier du Sorbier. En 2019, le premier contrat mis sur la table par le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop) de Paris 2024 était déséquilibré. Il reprenait des clauses strictes du droit anglo-saxon. Que ce soit en matière de prévention des atteintes à la probité ou de responsabilité en cas d’atteinte à l’image du Cojop. Du jamais vu à notre échelle, malgré notre expérience dans les contrats de sponsoring avec de grands noms du sport mondial.

"Du jamais vu à notre échelle, malgré notre expérience dans les contrats de sponsoring avec de grands noms du sport mondial."  

Ce partenariat avec les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 n’a rien d’ordinaire. En raison de l’ampleur des engagements financiers nécessaires à la livraison des jeux, le Cojop ne partage pas les mêmes intérêts que ses sponsors. Ce qui se ressent sur les modalités de facturation. Il est donc question d’équilibre à trouver et d’enjeux à combiner, entre les besoins immédiats du Cojop et nos contreparties à long terme. Même son de cloche sur le périmètre de notre accord. Le Cojop exclut du champ des partenaires potentiels tous les acteurs issus du pari sportif. Seule la loterie, dont la Française des jeux détient le monopole, est concernée par ce contrat de sponsoring. Autre fait notable : avec le Covid, la force majeure est devenue un sujet d’attention. Et cette France à l’arrêt a soulevé certaines incertitudes pour ce qui est des garanties s’il y a annulation.

En tant que directrice juridique, négocier un tel contrat est un formidable tremplin pour notre département. Avec une leçon à tirer : les juristes ne doivent pas intervenir uniquement en exécution des accords passés en amont, mais être des acteurs à part entière de la négociation des contrats de sponsoring. À l’instar des Anglo-Saxons, je milite pour que la direction juridique passe d’un statut de centre de coûts à celui de moteur de la stratégie de l’entreprise.

"En tant que directrice juridique, négocier un tel contrat est un formidable tremplin pour notre département." 

Quel dispositif contractuel avez-vous mis en place ?

Le Cojop nous a envoyé deux contrats : un contrat de partenariat et un contrat de licence. Le premier nous permet de communiquer sur notre rôle de partenaire. Le second, dissocié du premier, nous accorde le droit de mettre en avant des produits aux couleurs des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. C’est le cas de nos jeux de grattage, mais aussi de lotos sponsorisés spécialement pour l’occasion.

La seconde étape concerne l’activation de ce partenariat. Des opérations promotionnelles sont organisées sur le terrain. Des animations qui s’inscrivent impérativement dans les guidelines du Cojop. Dès lors qu’elle utilise un asset de Paris 2024, chacune de nos communications est relue et validée par le Cojop. Par exemple, pour nos sportifs ambassadeurs de la FDJ Sport Factory. Leurs photos ne doivent pas laisser apparaître des marques non-partenaires des JO. Difficile quand ces athlètes olympiques ou paralympiques sont membres d’une fédération avec ses propres partenaires. Le contexte de propriété intellectuelle est majeur. D’une part, il est contraignant. De l’autre, il dicte la façon dont nous gérons les droits et les revenus qui dépendent de ces contraintes. Autre exemple : nos prestataires et nos fournisseurs sont tenus de ne pas communiquer sur le fait qu’ils travaillent pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.

Une autre obligation structurante : l’ambush marketing. Nous vérifions que des tiers, qui n’ont pas payé, n’utilisent pas les assets de Paris 2024. Nous réalisons une veille constante grâce à notre maillage de 30 000 points de vente. Par le biais de communications sur le sujet, chacun de nos détaillants est sensibilisé à ces restrictions d’usage, y compris vis-à-vis de leur environnement. Ils peuvent remonter leurs alertes à l’échelle d’un réseau animé par 300 agents commerciaux, partout sur le territoire.

Comment votre entreprise aborde-t-elle les questions de compliance pendant les Jeux olympiques ?

Sans parler de compliance pure, le Cojop nous a transmis une palette de clauses RSE. Pour les goodies par exemple, nous devons nous référer à sa liste de prestataires ou démontrer la résilience de nos sous-traitants habituels.

Autre point de discussion avec le Cojop : les avantages que nous pouvions accorder à nos salariés bénévoles. Tout un programme a été mis en place pour engager et sélectionner des collaborateurs volontaires dans un cadre paritaire, autant de femmes que d’hommes. Par l’intermédiaire de jeux-concours, nous avons fait gagner une centaine de places nominatives à ces bénévoles pour assister aux jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.

"Autre point de discussion avec le Cojop : les avantages que nous pouvions accorder à nos salariés bénévoles." 

À titre plus personnel, quel sport a votre préférence ?

À défaut d’une discipline en particulier, j’aime voir à l’œuvre la ferveur et l’engagement dont font preuve les athlètes. Ces moments de dépassement de soi, de puissance et de courage sont très communicatifs. J’ai souvenir des prouesses de Kévin Mayer, mais aussi d’autres moments d’anthologie avec une équipe de cyclisme menée par Thibaut Pinot. Durant ces Jeux olympiques, je surveillerai de près tous les athlètes olympiques et paralympiques de la FDJ Sport Factory, dans leur quête d’une médaille d’or.

Propos recueillis par Jonathan Banuelos

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