La résolution des litiges hors des tribunaux à la cote. D’après une enquête du Centre de médiation et d’arbitrage de Paris, le nombre de dossiers de médiation a progressé de 27 % entre 2022 et 2023. Même constat de croissance à l’AMF depuis la pandémie, malgré une légère stagnation en 2023.
Arbitrage et Marc : les bilans encourageants du Cmap et de l’AMF
Les modes alternatifs de règlements des conflits ont le vent en poupe. En 2023, les dossiers de médiation représentaient 820,7 millions d’euros, soit 222,7 millions d’euros de plus qu’en 2022. Une progression de 27 % en un an, contre 0,9 % pour les dossiers d’arbitrage pour la même période. En 2023, le montant des affaires arbitrées culmine à 950 millions d’euros, un chiffre qui n’est qu’en légère hausse par rapport à l’année précédente (941 millions d’euros en 2022). Et si le nombre de dossiers traités par le Centre de Paris (CMAP) reste relativement stable (2261 dossiers de médiation et 21 d’arbitrage), leur succès, lui, progresse : 63 % des médiations ont abouti à un accord. Cela représente deux points de plus que l’année précédente (61 %).
La bonne santé des Marc et de l’arbitrage s’explique par l’intérêt des entreprises pour ces voies contentieuses nouvelles. “L'augmentation du nombre de dossiers en médiation et en arbitrage, particulièrement pour les litiges majeurs, témoigne de la confiance croissante des entreprises envers notre institution pour résoudre des conflits à fort enjeu”, analyse Bérangère Clady, directrice du pôle Mard du Cmap.
Parmi les motifs les plus fréquents de saisine du Cmap, l’inexécution contractuelle arrive largement en tête de liste : 46 % des médiations en font l’objet. Loin derrière, on trouve les dossiers de droit social (14 %), d’impayés (11 %). La propriété intellectuelle arrive ex aequo avec la rupture des relations contractuelles, les deux représentant chacune 8 % des litiges reçus. En queue de peloton, on trouve les conflits entre associés (4 %), les questions de droit des sociétés et de droit des affaires ainsi que celles relatives à l’immobilier et la construction (3 %). Les grands perdants de la médiation sont le droit de la concurrence et les problématiques de voisinage, qui représentent respectivement 2 % et 1 % des types de litiges traités par le centre de médiation.
Popularité de la clause d’escalade
Les entreprises ont bien compris les avantages de la médiation par rapport à la justice classique. Sophie Henry, déléguée générale du Cmap résume : “En choisissant ces modes alternatifs de résolution des différends, [les entreprises] gagnent en efficacité, réduisent leurs coûts et préservent leurs relations commerciales.” La médiation et l’arbitrage seraient devenus “des outils indispensables” permettant aux entreprises d’échapper à la longueur, à la complexité et au coût des procédures judiciaires régulièrement pointés du doigt. Les Marc font figure de voie express en comparaison. Pour l’arbitrage, la durée moyenne est de dix-sept mois, contre douze à trente-six mois pour une procédure judiciaire.
L’attraction opérée par ces modes de résolution des litiges imprègne les relations d’affaires. Les modes alternatifs de règlements des conflits sont de plus en plus intégrés dans les contrats : 59 % des saisines trouvent leur fondement dans une clause contractuelle, la fameuse clause d’escalade qui invite les cocontractants à fournir les meilleurs efforts pour dénouer leurs querelles en se passant de juge. Ce phénomène n’est pas, juste, “à la mode de Paris” : de plus en plus de parties à la médiation sont issues des régions françaises.
À l’AMF, le PEA donne du fil à retordre
La médiation fait également son chemin dans le secteur bancaire et financier. Marielle Cohen-Branche, médiatrice de l’Autorité des marchés financiers (AMF), comptabilise 1 922 demandes de médiation, un chiffre stable par rapport à 2022, mais en hausse depuis la crise du Covid : en 2019, l’AMF enregistrait 1 295 dossiers reçus en médiation, 1 479 en 2020 et près de 2 000 saisines en 2021.
Un quart des dossiers de médiation qui arrivent sur le bureau de la médiatrice en 2023 concernent les plans d’épargne en actifs. Sujets à controverse depuis 2022, ils soulèvent des problématiques liées au délai de transfert de ces plans et la divergence de réglementation fiscale entre établissements. Viennent ensuite les dossiers concernant l’épargne salariale (18 % des saisines) tandis que les dossiers clos en matière d’ordres de Bourse et d’opérations sur titres ont drastiquement diminué. Depuis 2023, les saisines relatives aux SCPI et au crowdfunding immobilier ont doublé. Le nombre de différends en matière de cryptoactifs a grimpé entre 2022 et 2023, passant de 54 dossiers à 83.
Ilona Petit