Associé chez Eversheds Sutherland depuis quelques mois, Olivier Le Bars cultive son côté entrepreneurial. Un brin hyperactif, l’avocat spécialisé en développement de projet et adepte du 11e arrondissement de Paris ne se lève pas après 6h30 et carbure au rock finlandais.

Le rendez-vous a été fixé dans un établissement de la rue Bréguet dans le 11e arrondissement de Paris. Tenue décontractée, sourire aimable, Olivier Le Bars habite à côté. Il a ses habitudes dans ce lieu, sorte de repaire pour ses collaborateurs et lui, quand ils télétravaillent. Ce qu’il en pense du télétravail d’ailleurs ? Un fonctionnement pratique et qui s’accommode bien avec les rythmes de travail intense d’un avocat en financement de projet. Et puis, il fait confiance à son équipe de onze passionnés, sa grande fierté, qu’il codirige avec ses associés, Sindhura Swaminathan, Louis-Jérôme Laisney et Jacques Bouillon.

L'école, non-lieu de curiosité

Olivier Le Bars est un avocat heureux. Et mesure la chance qu’il a : "Je ne croise pas souvent un avocat qui adore ce qu’il fait." Fils et petit-fils de médecins, il a comme trahi la tradition familiale en s’inscrivant à la fac de droit de Créteil, pour suivre son propre chemin, et prêter un autre serment que celui d’Hippocrate. Il raconte avec le sourire avoir subi "les remontrances familiales", notamment celles de son grand-père persuadé qu’il commettait une erreur. Avec le recul, ce natif d'Île-de-France se dit qu’il a peut-être été un "peu idiot" car il aurait aimé la médecine, pour son "utilité sociale plus évidente" et pour la "déconnexion" qu’offre le métier. Quand ce fan de Tim Burton décrit son parcours, il annonce tout de go qu’il n’était pas un "grand bosseur"Notre imagination ne fait qu’un tour. Olivier Le Bars appartenait donc à cette catégorie d’élèves peu concernés par les études supérieures, qui passent de classe en classe en travaillant juste ce qu’il faut pour. Enfant timide, il trouve que "l’école ne donne pas assez envie d’être curieux".

"Je me souviens précisément du jour, c’était le jour du décès de Michael Jackson"

À la fac, il jette son dévolu sur le droit public parce que les matières purement juridiques comme le droit civil ne l’attirent pas, et parce qu’il aime le droit constitutionnel et le droit administratif. "La jurisprudence administrative en dit long sur l’histoire républicaine." Entre 2008 et 2009, il réussit l’exploit de valider son master 1 en France en cumulant des petits boulots – serveur, vendeur en boulangerie… – à Londres, depuis ses huit mètres carrés du quartier de Notting Hill. Il voulait "rompre avec les études classiques sans perdre un an". Il revient à Paris, où il décroche le master 2 en droit public économique de la Sorbonne. Puis se met en tête de rédiger une thèse. Une ambition qui reste inaboutie, faute de financement, mais qui lui vaudra pendant ses premières années de collaboration, le surnom de "professeur". Il explique : "J’étais très technicien au début. J’avais l’impression que ça me crédibilisait. Je pouvais faire des mémos de 35 pages." Ça ne fait rien, il a deux plans B. Le même été, il tente d’intégrer la préparation à l’ENA (Prép'ENA Paris 1-ENS) – "Je me souviens précisément du jour, c’était le jour du décès de Michael Jackson", un funeste présage car il rate l’épreuve – et passe l'examen d’entrée à l’école du barreau. Celui-là, il le réussit du premier coup. Un stage PPI au sein de la branche transport de Véolia, et les dés sont jetés. Le jeune diplômé hyperactif sait ce qu’il fera après sa prestation de serment : du financement de projet. Après des débuts chez Fidal, il rejoint White & Case en 2013 qu’il ne quittera que huit ans plus tard pour Eversheds Sutherland.

Nightwish

Les premières années le forment à la technique. Puis il découvre que, quel que soit son secteur, un avocat doit aussi être un entrepreneur. "Pour avoir des dossiers, il faut aller les chercher avec les dents." Le jeune associé confie avoir pensé "être passé à côté du sel" de la profession pendant quelques années. Mais très vite, il se réjouit d’exercer "l’un des rares métiers qui mêlent intellectuel et développement commercial". C’est d’ailleurs ce qu’il cherchait en quittant son premier cabinet, "créer quelque chose" et "voir ce qu’on pouvait développer avec le marché existant". Fétichiste des chansons, Olivier Le Bars écoutait en boucle Nightwish, un obscur groupe de rock finlandais qui confine au métal, pendant le processus d’association. Et six mois plus tard, celui que "le boulot n’a jamais empêché de dormir" passe quelques nuits blanches. "Quand les choses marchent, on se rend compte que c’est précieux et qu’il faut porter l’activité." Gérer une équipe demande de s’investir. Il faut créer un climat de confiance et un cadre de travail sain. "J’ai l’impression que l’on veille davantage à limiter les nocturnes des collaborateurs."

Peter Pan

Les journées sont d’autant plus longues pour lui car il est "du matin et du soir". Il avoue avoir besoin de "beaucoup bouger". La journée démarre à 6h30 par une demi-heure de sport et se termine par un restau, un théâtre ou un concert. Le dernier en date, c’était 50 Cent. Derrière l’emploi du temps bien rempli, il y a probablement la "peur du temps qui passe". L’avocat de 37 ans n’établit pas lui-même le lien mais il avoue sa "relation immature à la mort". Un écho à l'un de ses quelques surnoms : Peter Pan. Olivier Le Bars craint de ne pas avoir le temps de tout faire, alors il fait tout. Il voit "du monde", il fait du trek, il prend six mois en 2019 pour partir en Amérique du Sud avec son sac à dos. Il travaille à ses projets, en Afrique ou ailleurs. Avec ses projets, classiques ou pro bono, il a "l’impression de faire partie de quelque chose". Un des meilleurs souvenirs de sa carrière porte justement sur un projet hydroélectrique à Madagascar, qui se heurte à de nombreux obstacles, mais dont il garde le sentiment d’utilité et d’une excellente relation client. "C’est parfois dur de couper les ponts avec les gens quand ça finit." C’est là la contrepartie d’un travail de longue haleine avec des équipes impliquées dans un projet pendant plusieurs années. Et s’il n’avait pas été avocat ? Olivier Le Bars enfant se serait bien vu tennisman professionnel ou pilote de ligne. Olivier Le Bars adulte songerait plutôt à créer une plateforme de développement de projets. Ça colle à la peau. 

Anne-Laure Blouin

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