Les nuits sont courtes pour l’avocat d’Ayache qui semble ne jamais laisser sa matière grise en paix. Olivier Tordjman court après les projets. À moins que ce ne soit l’inverse. Portrait d’un avocat un peu hors-norme.

Rendez-vous est pris au Royal Monceau où Olivier Tordjman a ses habitudes, selon le maître d’hôtel. Le voilà qui arrive en trombe, agenda en main – "c'est mon co-pilote de rallye du quotidien, comme mon data center". Vite, il commande un Coca-Cola qu’il touchera à peine et commence à parler. Olivier Tordjman est volubile. Né à Casablanca peu avant l’embrasement de la situation en Afrique du Nord et les grands retours, l’avocat vient d’une famille de "Pieds Noirs". Il se décrit comme une "parfaite caricature, issu d’une famille de trois enfants, d’un père entrepreneur qui a commencé en vendant des voitures, d’une mère partagée entre la politique et la gestion de son foyer." Entre deux vibrations d’un téléphone qui semble ne jamais s’arrêter, il raconte que dans les familles "méditerranéennes de sa génération, la fratrie se compose souvent d’un juriste, d’un médecin et d’un commerçant". La sienne n’échappe pas à la règle.

Concerts

Grandement inspiré par son père qui a "conquis le monde sans avoir le bac", Olivier Tordjman choisit le droit des affaires. Attiré par l’image de "l’avocat-homme d’affaires", il n’aurait jamais pu être pénaliste. Il rapporte quelque chose qu’on lui a dit une fois : "Le droit pour toi n’est en fait qu’un accessoire… au service des affaires." Dans le mille. Il avoue que ce qui l’intéresse, au fond, c’est le "projet" même si "les virgules, c’est tout de même important, surtout quand tout va mal". Tel un "consigliere", il s’est imposé très en amont dans les affaires de ses clients pour comprendre leur business et les aider à adopter la meilleure stratégie. Cette tête pensante veut garder les "mains dans le cambouis" : il "continue à faire du mark up", la nuit plutôt, pour ne pas "lâcher" la technique. Et parce que le juridique s’est "complexifié dans les dossiers au fil des années" avec des "réglementations de plus en plus sophistiquées". "En M&A, il n’y a plus d’opérations simples."

"L'homme ne se satisfait que trop brièvement ce qu’il a déjà réussi, il est toujours dans l’attente… Alors vivement le prochain nouveau projet."

Cet acharné de travail a toujours tenu "ces rythmes pathologiques de travail" grâce à une résistance naturelle et "sans aucune potion magique, comme Obélix". Olivier Tordjman se nourrit de projets, ceux de ses clients, qui sollicitent son aide pour sa compréhension de leurs business, et des siens. Seule, son activité d’avocat ne lui suffit pas. Raison pour laquelle il gère parallèlement une demi-douzaine de projets entrepreneuriaux. Il pense avoir trouvé l’origine de cette manie chez Beckett et sa réflexion sur le "phénomène de l’attente". "L’insatisfaction portée par chaque être humain" découle du fait que "l’homme ne se satisfait que trop brièvement ce qu’il a déjà réussi, il est toujours dans l’attente… Alors vivement le prochain nouveau projet." Sa vie personnelle aussi regorge de projets. Comme celui de faire un jour une énorme fête "sans raison pour une fois, l’anti-Quatre mariages et un enterrement" avec son "immense" famille qu’il ne voit plus assez. Une soirée à thème peut-être ? Olivier Tordjman est un "fou de déguisement". Il en a une "cave" pleine.

Et parfois, il rassemble et invite ses clients aux côtés de sa femme et de sa fille à un concert. Il "fonce" et en "ratant toujours la première partie" arrive à être à l’heure, et "jongle" pour faire plaisir à tout le monde. Et se faire plaisir à lui, grand amateur de musique qui a vu trois concerts de Lenny Kravitz, quatre de Lomepal, puis Sting, Coldplay, Juliette Armanet… Il doit l’admettre : l’intensité de son travail n’est tenable "qu’en poussant la machine au maximum en sacrifiant repos et sommeil". Et grâce surtout à son épouse, avocate elle aussi, "formidable soutien", ainsi qu’à une "famille et des cercles d’amis exceptionnels et compréhensifs".

Marketing

Celui qui fonctionne à coups de micro-siestes ("je m’endors en quinze secondes, pendant cinq ou dix minutes") explique sa réussite par le fait qu’il s’est "toujours battu pour ses clients comme si c’était son business". On a pu lui reprocher d’être "plus royaliste que le roi" mais ça fonctionne : la plupart de ses clients sont d’anciens adversaires. Ce bourreau de travail a une méthode : l’improvisation. "C’est un métier d’acteur, il faut de la séduction." Il a bien une "liste de points à aborder mais il les amène à l’intuition" au gré du "langage corporel" de ses interlocuteurs. L’avocat trouve que le cursus de droit manque de psychologie. Il en aurait bien fait son métier d’ailleurs, car deviner l’autre le passionne. Adolescent, il songeait plutôt à devenir pilote "pour avoir tel un oiseau une vie libre et indépendante" dit-il en riant. Mais avec les années, qui "seules permettent de savoir ce qu’on aurait voulu ou pu vraiment être", il "espère" qu’il aurait pu être "psychanalyste par passion et intérêt de l’autre", "être acteur" ou faire du "marketing" comme en témoigne "l’identité de marque" très affichée d’Ayache, son cabinet. Une manière pour lui d’exprimer son "anticonformiste". Bref, selon ses propres mots, Olivier Tordjman, on "l’aime ou on le déteste". Alors ?

Anne-Laure Blouin

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