L’industrie de la gestion d’actifs est soumise à une réglementation en constante évolution. Cet article explore les tendances, les défis et les accompagnements possibles.

DÉCIDEURS JURIDIQUES. Pour commencer, pourriez-vous nous parler des principales tendances actuelles dans le secteur de la conformité réglementaire ?

Pierre-Yvan Gaubert. Tout d’abord, la complexification de la réglementation. Les acteurs du monde financier sont aujourd’hui concernés à la fois par des obligations "cœur de métier" (MiFID II, anti-blanchiment, abus de marché…), mais aussi par des obligations issues de réglementations périphériques. Nous pouvons évoquer des textes aussi divers que ceux relatifs à la protection des données personnelles (RGPD) ou à la cybersécurité (Dora). Cette complexification réglementaire nécessite donc, pour les professionnels de la conformité, de maîtriser de nombreux sujets, très divers, et d’accroître le temps nécessaire à l’étude des textes et leurs conséquences.

"Cette tendance implique donc une grande réactivité des fonctions de conformité et de contrôle interne, de la pédagogie et de la formation, tant pour les clients que les opérationnels"

Ensuite, cette tendance étant liée à la première, la fréquente mise à jour des réglementations. Si les textes sont de plus en plus complexes, ils sont aussi fréquemment amendés ou modifiés. Citons, par exemple, la prochaine réglementation Mica sur les cryptoactifs, autrefois peu encadrés. Nous pensons aussi aux changements de réglementation comme la transformation du document d’information "DICI" en "DIC PRIIPS" ou encore les prestataires de crowdfunding ("CIP") devenus PSFP européens. Cette seconde tendance implique donc une grande réactivité des fonctions de conformité et de contrôle interne, de la pédagogie et de la formation, tant pour les clients que les opérationnels. C’est pour cette raison que nous attachons une très grande importance à l’exhaustivité, la précision et la régularité de nos veilles réglementaires.

Quels sont les principaux enjeux auxquelles les entreprises sont confrontées face à ces nouvelles régulations ?

Thomas Martin. Les enjeux sont multiples. D’abord, la gestion des risques financiers et réglementaires est cruciale, les différentes sanctions des régulateurs en témoignent. Par exemple, la directive AIFM impose des règles strictes d’organisation. Les sociétés doivent donc mettre en place des systèmes robustes pour s’y conformer, en particulier sur les valorisations des actifs en portefeuille, la gestion de la liquidité et la transparence des informations fournies aux investisseurs.
Un autre enjeu clé concerne la cybersécurité et la protection des données personnelles. Les sanctions peuvent être sévères, et les risques pour la réputation d’une société régulée sont considérables. Un ajout important à cette pression réglementaire est le Règlement sur la résilience opérationnelle numérique (Dora), qui entrera en vigueur en janvier 2025. Dora vise à renforcer la résilience des systèmes informatiques des institutions financières, en exigeant notamment des tests de cybersécu-
rité plus rigoureux, des plans de continuité des activités, etc. L’objectif est de mieux protéger le secteur financier contre les cyberattaques, qui sont de plus en plus fréquentes et sophistiquées. Enfin, la pression exercée par les investisseurs pour intégrer des critères ESG dans les investissements continue de croître. Les professionnels doivent répondre aux attentes de transparence de leurs investisseurs et le cas échéant, doivent revoir leurs méthodes d’analyse et de gestion. 

Quels sont les bons réflexes à avoir et les actions prioritaires à mener en 2025 ?

Michel Anid. Renforcer la cybersécurité en vue de Dora : avec Dora, il sera essentiel de renforcer les contrôles sur cette thématique. Cela passe par une application des textes réglementaires dont les bonnes pratiques identifiées par les contrôles SPOT de l’Autorité des marchés financiers (AMF). Il est également crucial de consulter les bulletins d’information des autorités (ANSSI, DGSI…). Enfin, collaborer avec des experts en cybersécurité permettra de se préparer efficacement aux menaces
numériques émergentes.

Maintenir une vigilance constante sur les risques liés au blanchiment et au financement du terrorisme : la LCB-FT reste une priorité constante des régulateurs et un motif régulier de sanction. La lutte contre les infractions fiscales, le blanchiment ou le financement du terrorisme est de plus en plus visible, nécessitant de
la part des criminels la mise en œuvre de schémas de blanchiment plus sophistiqués. Ces derniers sont prompts à saisir toutes les opportunités pour en tirer profit,
comme lors de la crise de la Covid-19 (faux masques, faux certificats…). Il est donc indispensable de renforcer les processus de contrôle pour détecter et prévenir ces
activités illicites, rester à jour de la réglementation et de l’actualité et sensibiliser régulièrement ses collaborateurs.

Accompagner le développement de la finance verte et encourager la transparence envers les investisseurs : si la réglementation applicable à la "finance verte" est récente et encore en pleine définition, son développement semble toutefois constituer un mouvement de fond. Une approche rigoureuse et professionnelle dans la sélection des actifs liés à la finance verte devient donc cruciale. Les régulateurs insistent sur la cohérence entre le discours commercial et les pratiques de gestion pour ne pas induire les souscripteurs en erreur, ce qu’on nomme le "greenwashing" ou "éco-blanchiment". L’approche d’Agama Group combine l’uti-lisation de technologies de pointe, une expertise réglementaire approfondie, et un accompagnement stratégique pour permettre à nos clients de rester conformes tout en tirant parti des nouvelles exigences pour se différencier sur le marché. La conformité ne doit pas être perçue uniquement comme une contrainte, mais aussi comme une opportunité de créer de la valeur ajoutée dans un environnement en constante évolution.

"Les régulateurs insistent sur la cohérence entre le discours commercial et les pratiques de gestion pour ne pas induire les souscripteurs en erreur"

L’une de nos principales offres est notre RegTech BELT Solutions. Cet outil digital de conformité et de contrôle interne est conçu spécifiquement pour répondre aux besoins des RCCI (responsables de la conformité et du contrôle interne) et des RCSI (responsables de la conformité pour les services d’investissement). BELT traite les contrôles de 1er, 2nd et 3e niveaux. L’outil permet une mise à jour permanente des plans de contrôle en fonction des évolutions réglementaires, avec un accès centralisé aux références réglementaires, à un calendrier multijuridictionnel des exigences de reporting réglementaire, tout en maintenant une piste d’audit.

Propos recueillis par Mathilde Aymami

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