Le monde de l’assurance et des affaires fait face au défi du temps : un souci permanent et en constante évolution qui trouve un écho salutaire dans le développement de solutions alternatives.

L’augmentation statistique des risques

Dans un contexte où l’indice Risques Industriels au 1er avril 2024 confirme la légère baisse amorcée au trimestre précédent, et ce, après douze années de croissance du ratio prime/risque, les sinistres « non-vie » ont augmenté de + 10,5 %, pour atteindre près de 100 milliards d’euros ces deux dernières années.

Sur le marché de l’assurance, cette sinistralité s’observe sur l’ensemble des lignes d’activité et s’est accrue face à deux (ré)évolutions récentes : l’impact conjoncturel de la crise sanitaire et l’impact structurel de l’essor de l’Intelligence Artificielle.

Cette amplification des risques d’entreprise génère un accroissement des sinistres en gestion et des conflits, qui alimente à son tour un important contentieux  entre assurés et assureurs ou à l’égard des tiers, mettant parfois en opposition le temps des affaires à celui des tribunaux.

Le temps judiciaire de plus en plus incompatible avec le temps des affaires

"Avec du temps et de la patience, on vient à bout de tout", dit-on. Pour autant, en matière de sinistralité, les entreprises et leurs assureurs sont de plus en plus confrontés à une réalité qui ne s’accommode pas toujours avec l’enchaînement d’une expertise amiable, d’une expertise judiciaire, puis d’un procès jusqu’à décision définitive, et ce, sans même évoquer l’aléa judiciaire.

En matière de RC & Assurances, force est de constater que la gestion du risque professionnel, et plus particulièrement industriel, ne se satisfait plus systématiquement d’un processus aussi complet de recherche de causes et d’imputabilité. Un sinistre en cours alourdit la dynamique d’entreprendre pour nombre d’entreprises et peut générer des pertes de marché.

Et si l’approche du temps n’est pas la même pour l’assureur et pour l’entreprise, tous deux doivent composer ensemble alors que le temps est plus que jamais devenu un enjeu et que le coût économique spécifiquement lié à la durée d’une dérive judiciaire a une incidence certaine dans le domaine des affaires, comme le besoin pour l’entreprise de vider au plus vite un contentieux afin de s’assurer une visibilité sur ses projections de développement et ses engagements financiers.

Le temps judiciaire a donc une valeur économique. Et ce que le monde des affaires a pu jusqu’alors accepter de considérer comme un temps "raisonnable" se heurte aujourd’hui à une réalité dans laquelle la concurrence exacerbée, l’exigence d’une prestation, distribution, production toujours plus rapides sont en opposition avec la définition même de la patience, à savoir "la vertu permettant de supporter avec résignation les difficultés".

L’évolution du droit commercial répond aux exigences de la vie des affaires que sont la rapidité et la sécurité. Pour pénétrer un marché, il faut être incisif face à une concurrence accrue. Et pour y demeurer, il faut pouvoir recourir à des solutions utiles pour la résolution des conflits, qui favoriseront aussi la pérennité, et donc la sécurité, des échanges commerciaux que le parcours judiciaire ne satisfait que rarement en définitive.

Un sinistre, c’est souvent un client perdu. La question n’est donc pas seulement celle de la lenteur de la justice à raison de son manque de moyens. Elle est au-delà, elle touche à l’évolution même de la société dans laquelle les entreprises évoluent et tissent le lien économique. La recherche de vérité technique, la curiosité ô pourtant nécessaire d’analyser cèdent le pas à l’urgence avant tout de survive au marché.

L’essor des solutions alternatives au règlement des conflits

Le recours à la transaction est déjà très présent dans le monde des affaires, et bien sûr fait œuvre efficace d’accélération de résolution des différends car même "normalement rapide", la justice restera toujours plus lente qu’une négociation.

"Un mauvais arrangement mieux qu’un bon procès" ?

Mais s’il faut louer les divers recours à une solution amiable, il faut être conscient qu’un mauvais arrangement palliera certes la lenteur d’un procès, mais provoquera aussi souvent un sentiment de déséquilibre ou de contrainte qui mettra un terme la plupart du temps à toute perspective d’avenir commercial ensemble.

C’est là qu’il faut convaincre les acteurs du marché des avantages des MARD, et en particulier la médiation qui tire son épingle du jeu dans le paysage alternatif.

Ce processus, facilitateur de solutions, offre deux avantages : en terminer avec le conflit et pérenniser les échanges commerciaux entre les parties. La solution peut être complexe ou créative – on la dit souvent "hors cadre" –, mais l’objectif reste d’aller vite ET bien.

C’est un changement radical de paradigme et aux côtés des médiateurs, les avocats doivent prendre toute leur part dans ce grand chantier.

Émergence d’un nouveau paradigme, celui de dépasser le passé pour pérenniser les échanges commerciaux

Si le conflit est une dimension inévitable de la vie des affaires, la médiation a pour ambition de reconstruire ce qu’il a détruit, et enrayer la dynamique de l’escalade antagoniste. En d’autres termes "contraindre est de moins en moins efficace, convaincre de plus en plus nécessaire". Elle permet de rétablir un échange équilibré entre les parties, évoquées dans leur passé qu’il faut dépasser, dans leur présent qu’il faut débloquer et dans leur futur qu’il faut (re)construire ensemble. En restaurant le lien contractuel, elles aboutissent à une solution acceptée et donc durable.

Les statistiques plaident en faveur de la médiation : elle met un terme au conflit interentreprises et apporte une solution efficace en moyenne dans 75 % des cas, en trois mois maximum, avec 100 % de réussite dans l’exécution.

Le tout dans une confidentialité absolue, avec une bonne gestion du temps et un contrôle des coûts. Le tissu économique n’en sort que renforcé, il s’inscrit dans le mouvement de la modernisation de la justice tout en échappant à ses écueils. Ainsi est également contrebalancé l’effet inflationniste de l’IA dans la sinistralité en ramenant au cœur de la solution les échanges directs et humains. Le monde des affaires a tout à y gagner pour sécuriser ses partenariats interentreprises.

Carine Détré

SUR L’AUTEUR

Carine Détré, avocate RC & Assurances inscrite au barreau de Paris depuis 1998 et médiatrice agréée par le CMAP depuis 2019, a fondé le cabinet cdavocats en se donnant pour objectif d’accompagner les entreprises et professionnels de l’assurance avec la conviction bien ancrée qu’une sortie de crise consentie et apaisée apporte davantage de pérennité et de développement au monde des affaires, et que l’outil médiation, que ce soit en qualité de médiatrice ou de conseil accompagnant ses clients en contentieux ou en médiation, optimise la gestion de sinistre.

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