La principauté de Monaco et la France entretiennent depuis toujours des liens étroits qui se sont traduits par la ratification de nombreux accords, et notamment par deux conventions fiscales bilatérales en 1950 et 1963. La convention fiscale du 1er avril 1950 est la seule et unique convention en matière de succession que Monaco ait ratifiée. Audrey Michelot, counsel, et Géraldine Gazo, avocat associé, CMS Monaco, vous proposent un décryptage de ces spécificités et des évolutions jurisprudentielles.

Le champ d’application de la convention franco-monégasque en matière de succession est, par principe, limité aux ressortissants français et monégasques domiciliés dans l’un de ces deux États et permet de faire obstacle aux dispositions du droit interne français (article 750 ter du Code général des impôts).

 

S’agissant du domicile du défunt, l’article 1er de la convention sur les successions précise que sont considérés comme domiciliés à Monaco les ressortissants français ayant habituellement résidé dans la principauté pendant au moins cinq ans à la date de leur décès.

 

La Cour de cassation a tranché la question de l’application de la convention franco-monégasque sur les successions aux ressortissants d’autres États en assemblée plénière le 2 octobre 2015[1].

 

Cette décision a confirmé que le bénéfice de cette convention pouvait être accordé à un défunt ressortissant d’un pays tiers, à deux conditions. Il doit premièrement avoir bénéficié d’une clause de non-discrimination en vertu de la convention fiscale signée entre la France et le pays de sa nationalité qui s’applique à tous les impôts et aux personnes, qu’elles soient ou non résidentes des États contractants. De plus, il doit avoir habituellement résidé à Monaco pendant 5 ans à la date de son décès.

 

Il convient d’analyser au cas par cas l’étendue de chaque clause d’égalité de traitement.

 

Concernant les règles d’imposition, contrairement à d’autres conventions, la Convention franco-monégasque ne limite pas son champ d’application aux biens situés en France et à Monaco.

 

Elle répartit le droit d’imposer les biens successoraux, entre Monaco et la France, selon le lieu du domicile du défunt ou le lieu de situation des biens, plus précisément de la manière suivante :
  • les immeubles et droits immobiliers sont uniquement imposables dans l’État où ils sont situés (art. 2) ;
  • les biens meubles corporels, les billets de banques et autres espèces monétaires (autre que ceux affectés à une entreprise commerciale, industrielle ou autre) sont soumis aux droits de succession dans l’État où ils se trouvent effectivement à la date du décès (art. 3) ;
  • les biens meubles corporels et incorporels investis dans une entreprise commerciale, industrielle ou autre, sont imposables dans l’État où l’entreprise possède un établissement stable (art. 5) ;
  • les actions ou parts sociales et autres biens incorporels ne sont imposables que dans l’État du dernier domicile du défunt, si ce dernier était domicilié au moment de son décès en France ou à Monaco (art. 6 a).
Ainsi, il est important de distinguer le traitement fiscal des biens immobiliers détenus en nom propre de celui des biens détenus par l’intermédiaire d’une société civile.

 

En effet, l’arrêt de la Cour de cassation précité a confirmé que les parts d’une société civile monégasque ne relevaient pas de l’article 2 de la convention sur les successions portant sur les immeubles détenus en direct, quand bien même la société serait considérée comme une société à prépondérance immobilière en vertu du droit interne français, et qu’il convenait de se référer à l’article 6 visant les actions ou parts sociales.

 

Les parts de société civile relèvent de la compétence exclusive de la Principauté de Monaco en matière de succession lorsque le défunt était domicilié à Monaco au jour de son décès.

 

Enfin, il est important de rappeler qu’en application de l’article 2, les biens immobiliers situés à Monaco ne sont pas soumis aux droits de succession en France, et ce, quel que soit le lieu du domicile du défunt ou de ses héritiers.

 

[1] Cass. ass. plén., 2 octobre 2015, n° 14-14.256

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