Lors de la souscription d’un contrat d’assurance-vie, le souscripteur-assuré doit choisir le ou les bénéficiaires qui percevront le capital lors de son décès. Il est important d’effectuer ce choix car en l’absence de bénéficiaire désigné, les capitaux dus par l’assureur tombent dans la succession du souscripteur-assuré et reviennent à ses héritiers, mais sans le bénéfice de la fiscalité favorable de l’assurance-vie. Décryptage.
Le choix des bénéficiaires, effectué lors de la souscription, n’est pas définitif puisque le souscripteur-assuré a la possibilité de modifier la clause bénéficiaire pendant toute la durée du contrat, notamment pour supprimer ou ajouter un bénéficiaire et modifier la part de chacun. À cet égard, choisir la désignation bénéficiaire standard "mon conjoint, à défaut mes enfants, à défaut mes héritiers", proposée dans les bulletins de souscription de la plupart des contrats d’assurance-vie, peut s’avérer inopportune. En effet, attribuer la totalité du capital au conjoint survivant prive les enfants de tout droit dans le capital du contrat d’assurance-vie. Cette désignation est susceptible d’entraîner une contestation des enfants, notamment si tous les enfants ne sont pas communs.
 
Protéger son conjoint sans oublier les enfants
Pour protéger le conjoint sans léser les enfants, il peut être préférable de désigner le premier comme bénéficiaire en usufruit et les seconds comme bénéficiaires en nue-propriété. Avec une telle clause, et sous réserve que l’usufruitier soit dispensé de faire emploi du capital et de fournir caution, les capitaux seront remis par l’assureur au conjoint survivant usufruitier qui pourra s’en servir comme s’il en était propriétaire ; on parle alors de quasi-usufruit. Les enfants nus-propriétaires seront quant à eux créanciers du quasi-usufruitier, créance qu’ils feront valoir dans la succession de ce dernier. La désignation standard peut également être inopportune fiscalement. En effet, depuis 2007 les successions entre époux et entre partenaires de Pacs sont exonérées de toute taxation, y compris pour les sommes transmises hors de l’assurance-vie.  Dès lors, il peut être préférable de privilégier d’autres voies pour protéger son conjoint et de réserver le bénéfice d’un contrat d’assurance-vie à des bénéficiaires qui seraient taxés plus lourdement s’ils recevaient des sommes équivalentes par succession.
 
Comprendre la fiscalité
Rappelons qu’en application de l’article 990 I du CGI, les capitaux reçus par le bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie sont exonérés dans la limite d’un abattement de 152 500 euros, puis sont taxés forfaitairement à 20 % pour la part comprise entre 152 500 euros et 852 500 euros et sont taxés à 31,25 % au-delà de ce montant. Ces règles sont applicables aux capitaux reçus par chaque bénéficiaire au titre d’un contrat souscrit ou alimenté à compter du 13 octobre 1998 par un souscripteur-assuré âgé de moins de 70 ans au moment du versement des primes. Cette fiscalité peut inciter à multiplier le nombre des bénéficiaires et, par exemple, à attribuer une partie du capital aux petits-enfants. Les primes versées après 70 ans sont quant à elles soumises, en application de l’article 757 B du CGI, aux droits de succession suivant le lien de parenté entre le souscripteur-assuré et le bénéficiaire, au-delà d’un abattement de 30 500 euros. Cet abattement est unique, quel que soit le nombre de contrats souscrits et le nombre de bénéficiaires désignés. Enfin, rappelons que les capitaux décès dus au titre des contrats souscrits et des primes versées avant le 13 octobre 1998 par un souscripteur-assuré alors âgé de moins de 70 ans demeurent totalement exonérés de fiscalité successorale. 

 

Stéphane Jacquin, associé-gérant - responsable de l'ingénierie patrimoniale, Lazard Frères Gestion

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