Marché de l'emploi : de la démission aux "salariés boomerang"
Face à la pénurie de compétences, le retour de collaborateurs talentueux constitue bien évidemment une aubaine pour les recruteurs. L’étude américaine "The Corporate Culture and Boomerang Employee Study" réalisée en 2018 par WorkPlace Trends révèle que 76% des services RH seraient favorables à recruter leurs anciens collaborateurs les plus performants.
Une question culturelle
Selon l’étude menée en avril 2022 "Rester, partir ou revenir… Telle est la question" par Morning Consult pour UKG, la France est à la traîne en matière de salariés boomerang. Seulement 13% des démissionnaires réintègrent un poste qu’ils avaient quitté, un chiffre inférieur à la moyenne des autres pays sondés qui atteint 20%. Selon Rémi Malenfant, directeur de l’innovation RH et de l’expérience client chez UKG, ces chiffres s’expliquent : "Aux États-Unis et au Royaume-Uni, les gens restent moins longtemps au même poste et changent régulièrement d’employeur. Ensuite, les managers français sont culturellement moins enclins à réintégrer d’anciennes recrues que leurs homologues anglo-saxons, car ils estiment que quand quelqu’un part, la confiance est rompue."
Si jusqu’à présent rester plusieurs années dans son entreprise renvoyait une image de fidélité, avoir occupé plusieurs postes est aujourd’hui perçu comme une opportunité pour les employeurs.
60% des collaborateurs ayant quitté leur entreprise déclarent regretter leur choix
Gagnant-gagnant
Il semble toutefois que les salariés, eux, soient plus enclins à sauter le pas que leurs managers. Le même sondage révèle en effet que 60% des collaborateurs ayant quitté leur entreprise regrettent leur choix. Ils sont par ailleurs 65% à exprimer aussi leur volonté de revenir chez leur ancien employeur si la proposition leur était faite, chiffre qui s’avère bien supérieur à la moyenne des pays sondés qui atteint 40%. Les principaux regrets des collaborateurs ayant quitté leur entreprise seraient liés aux collègues, en tête du classement à hauteur de 38%, et le confort lié à la connaissance du poste dans 31% des cas.
Dans ces conditions, il semble bien que ce soit plutôt aux recruteurs d’ouvrir leurs horizons, d’autant plus qu’ils ont tout à y gagner, cela leur permettant de faire l’économie du processus de recrutement. En quittant l’entreprise pour une autre, le salarié aura mûri par l’expérimentation de nouvelles façons de travailler, une culture d’entreprise différente et par le développement de savoir-faire, avant de se rendre compte qu’il préférait sa précédente entreprise. En effet, selon l’étude "Boomerang Employees and Perceptions of Rehiring" menée en 2019 par Zen Business, ces recrutements se révèlent concluants pour 75% des recruteurs. Plus de la moitié (55%) déclarent même apprécier davantage le travail des collaborateurs lors de cette réembauche.
En somme, le phénomène des salariés boomerang se fait le reflet d’un changement de mentalités au travail. Il constitue sans doute, au moins en partie, une forme de validation des pratiques RH de l’entreprise car il ne peut se faire qu’avec un accompagnement des RH, de l’intégration jusqu’à l’offboarding.
Alexis Ellin