Hanna Müller est psychologue référente chez moka.care, qui organisait le 14 mars dernier un webinaire intitulé "Parentalité en entreprise : comment créer un climat propice à l’épanouissement des équipes ?". Elle apporte son expertise dans le conseil aux entreprises sur la santé mentale au niveau individuel et organisationnel pour des stratégies de prévention et d’intervention, notamment sur les thèmes du stress, de l’épuisement professionnel, ou encore de la parentalité.

 

Décideurs RH. Comment abordez-vous votre travail en tant que psychologue chez moka.care ?

Hanna Müller. Pour appréhender au mieux un premier échange avec une psychologue, je dis souvent que c’est avant tout une discussion entre deux personnes. La seule différence : on vient pour parler de choses très personnelles et souvent douloureuses. Ça peut être difficile avec un inconnu et c’est tout à fait normal. Alors, première chose, on n’est pas obligé de tout dire tout de suite, même à un psychologue. Je suis là pour apporter du soutien mais c’est l’employé qui définit le rythme de nos échanges et la profondeur des sujets abordés.

La démarche de consulter un psychologue représente souvent une étape cruciale. Beaucoup retardent cette décision pendant des années, souvent en raison de la crainte d'être jugés, d'un manque, de la tendance au déni ou la minimisation de leurs problèmes, des contraintes financières, ou encore de l'accès géographique aux services psychologiques. Depuis la crise sanitaire, les psychologues se sont adaptés et consultent maintenant en ligne, ce qui possède l’avantage d’être plus accessible pour des personnes qui vivent loin des centres-villes mais aussi, et surtout, d’être moins intimidant pour celles et ceux qui n’osaient pas franchir le pas puisque la santé mentale reste un sujet relativement tabou.

D’après votre expérience, quelle est la place des problématiques liées à la parentalité dans le monde de l’entreprise ?

H.M. En dehors des problèmes d’organisation tels que la garde d’enfant ou la politique du congé parental, les problématiques les plus fréquentes restent le stress et la charge mentale. Jongler entre les responsabilités professionnelles et familiales peut mener jusqu’à l’épuisement émotionnel voire au burn out parental : cet état de stress prolongé, d’épuisement émotionnel suite à l’arrivée d’un enfant. Je constate également un fort sentiment de culpabilité qui se manifeste surtout chez les nouveaux parents. Quand ces derniers consacrent du temps à leur travail, ils ont l’impression que cela s’effectue au détriment de l’éducation de leur enfant. Il s’agit d’un sentiment qui est souvent accentué par les attentes sociales et les normes parentales intériorisées. En leur for intérieur, les parents se trouvent alors pris dans un conflit de valeurs entre leurs aspirations professionnelles et la volonté de passer du temps en famille, qui peut aller jusqu’à la crise identitaire entre leurs différents rôles.

Comment les DRH peuvent, selon-vous, améliorer la situation des personnes lors du processus de parentalité ?

H.M. Être attentif aux signaux faibles des jeunes parents apparaît indispensable, par exemple : l'irritabilité, le changement d’humeur, l'absentéisme accru, l'isolement social, le désengagement mais aussi le surengagement. Par ailleurs, trouver une politique RH adaptée à leur besoin de flexibilité s’avère indispensable que cela soit à travers le congé parental, un service de garderie sur le lieu de travail ou via de l’aide pour les nombreuses démarches administratives.              
Il est également nécessaire de fournir aux parents un accès facile à des ressources telles que des programmes de soutien ou de reonboarding, sans que l’employé ait à en faire la demande. Un retour de congé parental peut être compliqué puisque la personne concernée, comme l’organisation au sein de son environnement de travail, ont pu connaître des changements qui requièrent une adaptation.        
Enfin, le point primordial selon moi reste la culture d’entreprise, véritable garante d’un environnement sain où les parents sont capables d'exprimer si ça ne va pas sans peur de jugement ; ce que l'on appelle la sécurité psychologique. Le rôle des DRH et des managers est de permettre un retour au travail dans les meilleures conditions grâce à un suivi ponctué de rendez-vous réguliers. L’équilibre est très sensible puisqu’il ne faut pas tomber non plus dans la surprotection, un phénomène observé qui prive souvent les mères de grands projets stimulants, et donc d’avancement de carrière, sous prétexte de les préserver.

Propos recueillis par Cem Algul

 

Accédez ici au replay du webinar moka.care « Parentalité en entreprise : comment créer un climat propice à l’épanouissement des équipes ? » 

 

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