Lundi 5 février 2024, le président de la 11e chambre correctionnelle du tribunal de Paris relaxe François Bayrou dans l’affaire dite “des emplois fictifs du MoDem”. Huit prévenus, dont cinq ex-eurodéputés ont été condamnés. 

Le doute profite à l’accusé.  Le tribunal de Paris a relaxé ce matin François Bayrou dans l’affaire des assistants européens du MoDem. Après avoir nié en bloc les accusations de complicité lors de son audition du 7 novembre 2023, l’ancien garde des Sceaux, mis en examen en 2019, échappe à la peine d’inéligibilité et les trente mois d’emprisonnement avec sursis requis par le parquet. À l’inverse de huit cadres et élus centristes (dont cinq anciens eurodéputés) ont été reconnus coupables des faits de détournement de fonds publics européens. Deux autres prévenus ont été relaxés.

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Selon le tribunal, aucun élément du dossier ne prouve que François Bayrou a eu vent de l’inexécution des onze contrats d’assistants parlementaires litigieux. Ni qu’il a demandé aux députés européens “d’employer fictivement des assistants parlementaires”, précise le jugement lu ce matin au nouveau tribunal de Paris. Le président du tribunal tempère sa relaxe : “Il est très probable” que les actes commis par trois des prévenus l'aient été avec “l'autorisation de monsieur Bayrou”. Cependant, “il n'est pas rapporté la preuve de cette autorisation”. Le Parquet soutenait que l’homme politique avait été le “décideur principal” d’un système d’utilisation des fonds européens pour rémunérer les assistants parlementaires affectés en réalité aux partis centristes français. Si “le bénéfice du doute” profite à François Bayrou, les juges ont confirmé l’existence des malversations, retenant les qualifications de détournement de fonds publics et d’emplois fictifs.  

Parmi les huit condamnés, l’ancien ministre de la Justice Michel Mercier écope d’une peine de dix-huit mois de prison avec sursis, 20 000 euros d’amende, ainsi que deux ans d’inéligibilité avec sursis. Jean-Jacques Jégou, trésorier du parti, est quant à lui condamné à douze mois de prison avec sursis, 10 000 euros d’amende et deux ans d’inéligibilité. Le tribunal a également infligé une amende de 20 000 euros, une peine de dix-huit mois de prison et de deux ans d’inéligibilité à l’ex-directeur financier du MoDem, Alexandre Nardella, qui avait comparu le mardi 31 octobre 2023. Cinq députés européens, Jean-Luc Bennahmias (une peine de douze mois avec sursis et 30 000 € d’amende), Anne Laperrouze, Bernard Lehideux, Thierry Cornillet et Janelly Fourtou, sont condamnés à des amendes allant de 15 000 à 50 000 euros assorties de peines de prison et d’inéligibilité avec sursis. Quant aux partis, ils ne sont pas en reste. Le parti Union pour la démocratie française (UDF) est condamné à 150 000 euros d’amende (100 000 euros fermes) et le MoDem à 350 000 euros (300 000 euros fermes).

Pour François Bayrou, défendu par les avocats Pierre Cornut-Gentille, Pierre Casanova et Paul Mallet, c’est la fin “d’un cauchemar de sept années”. Du côté des plaignants, on se satisfait de la décision. Patrick Maisonneuve, l'avocat du Parlement européen, se réjouit que le juge reconnaisse l’exigence d’“une tromperie à l'égard et du Parlement européen et du contribuable européen”. Et d’expliquer “mon sujet est que le parti a été reconnu coupable à la fois de complicité et de recel de détournement de fonds publics".

Le RN sur le banc des prévenus

Alors que l’affaire des emplois fictifs du MoDem avait été lancée par une dénonciation d’une ancienne élue du Rassemblement national (RN), Sophie Montel, ce sera bientôt au tour de la chef de file du parti, Marine Le Pen, et 26 autres membres du RN de passer à la barre pour des faits semblables. D’après le Parlement européen, le préjudice lié au système des eurodéputés d’extrême droite est largement supérieur à celui causé par le MoDem. Il l’évalue à 6,8 millions d’euros, contre un pour les centristes, finalement réduit à 350 000 euros à l’issue de l’instruction.

Nora Benhamla

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